C’est le 30 juillet 1939 que les « Géants de la route » font étape pour la première fois à Troyes. En réalité, il s’agit d’une demi-étape pour ce dernier jour de course du 33e Tour de France. Les coureurs proviennent de Dijon et repartent, après une rapide collation, en direction de Paris pour l’arrivée finale au Parc des Princes.
Le contexte d’avant-guerre a amputé le Tour de France des équipes nationales allemandes, italiennes et espagnoles. Les 4000 km de course ont également eu raison d’une trentaine de coureurs et c’est par conséquent un peloton groupé composé des cinquante coureurs rescapés qui se présente à Troyes.
Des dizaines de milliers de spectateurs sont arrivés de bonne heure afin de profiter pour la première fois de la mythique caravane publicitaire. Elle est composée d’une cinquantaine de véhicules animant la ville dès 7h30. Les spectateurs les plus chanceux ont pu acquérir pour 2 ou 3 francs un ticket leur permettant d’approcher au plus près leurs idoles sur le site d’arrivée.
Le peloton a quitté Dijon à 4h30. Il traverse le département en empruntant la route de Bar-sur-Seine. Arrivant à Troyes vers 9h30 par le faubourg Croncels, l’arrivée est jugée sur le boulevard du 14-Juillet au niveau de la rue Louis-Ulbach. Après 151 km d’effort, c’est au bout d’une belle ligne droite de 400 mètres que Le Grevès (équipe de l’Ouest) enlève au sprint l’étape devant Fournier (Ile-de-France) et Neuville (Belgique). Photographes et journalistes ont à peine le temps d’immortaliser l’instant tant la pression de la foule est grande. Le vainqueur empoche la coquette somme de 3500 francs.
Si le porteur du maillot jaune, et vainqueur final du Tour, est le Belge Sylvère Maes, c’est le très populaire René Vietto, second au général, qui fait l’objet de toutes les attentions de la part des amoureux de la petite reine présents ce jour-là. Les pansements recouvrant les jambes et bras des rescapés témoignent de la difficulté de l’épreuve. Chacun aura également reconnu le Troyen Marcel Bidot qui s’affaire à signer des autographes.
Sitôt la ligne franchie, les coureurs partent se restaurer à l’école du boulevard du 14-Juillet où un copieux buffet leur est proposé. Viandes froides, salades, fromage de Chaource, fruits, bière sont au menu. Les rescapés du Tour en profitent pour remplir leurs poches de victuailles. Certains consacrent un temps pour un bénéfique massage, d’autres pour une révision sommaire de leur machine.
Mais la liesse est de courte durée pour ce premier passage à Troyes. A 10h30, le Maire, René Plard, donne le départ aux coureurs qui s’élancent vers Paris via l’avenue Galliéni pour une ultime étape de 200 km. Les Aubois accompagnent en nombre les coureurs jusqu’à la sortie du département, faisant définitivement de ce premier passage de la Grande Boucle un évènement historique.
Texte Benoit Nayrac